Un ancien enfant des rues rend l’espoir aux bidonvilles de Nairobi

août 08, 2018
LECTURE DE 4-MINUTES

Sam rend l’aide qu’il a reçue

Samuel Omoll vivait avec ses parents à Nairobi, au Kenya, lorsque sa vie a basculé. Il n’avait que 9 ans.
 
Son père, sa mère et sa sœur encore bébé ont été tués dans un accident de voiture. Samuel et sa sœur de 5 ans se sont retrouvés orphelins. Les deux enfants ont été séparés, chacun pris en charge par un membre de leur famille, et Samuel est parti vivre à la campagne avec sa grand-mère. Au cours des deux années suivantes, il n’a cessé de changer de foyer, jusqu’à ce que — âgé de 11 ans — il prit la terrible décision de vivre dans les rues avec deux amis.
 
« Ma famille ne s’occupait pas de moi et m’exploitait », explique-t-il. « C’était mieux de vivre dans les rues. Nous mangions et dormions ensemble. Nous trouvions de la nourriture dans les poubelles et parfois, des gens nous donnaient à manger. »

Pendant trois ans, les garçons ont réussi à survivre dans les rues de Kericho et Kisumu avant de finalement revenir à Nairobi. Malheureusement, une vie encore plus rude les y attendait. Les trois garçons fouillaient l’immense dépotoir de Dandora pour y trouver de quoi manger, ou tout objet qu’ils pourraient revendre pour leur permettre de payer leur loyer dans le bidonville de Korokocho. Sam n’avait que 14 ans. 
  
« Nous respirions de la colle pour nous sentir bien. Puis nous avons rejoint un gang de fouilleurs de dépotoirs et là, notre consommation est devenue importante », confie-t-il. « La vie dans les rues était plus rude : nous avons commencé à voler et c’est devenu dangereux. »


Un groupe de quatre jeunes hommes assis sur une pile d’ordures
Sam discute avec des jeunes à côté du dépotoir de Dandora, où il passait du temps enfant. Photo : Samuel Omoll

Un jour, Samuel, malade, est resté chez lui tandis que ses amis d’enfance sont sortis avec le gang. Les choses ont mal tourné et le plus jeune a été lapidé à mort, « enterré par la ville ».
 
Sam a été bouleversé par la mort de son ami. Cette tragédie marqua un tournant décisif : peu de temps après, Sam décida de quitter le gang. Il trouva un emploi de gardien d’autos dans un autre quartier de la ville. C’est là qu’il fut repéré par des employés de Vision Mondiale et recruté pour travailler sur un projet destiné aux orphelins et aux enfants vulnérables.
 
Sam avait toujours voulu être journaliste, mais c’était presque impossible sans éducation officielle. Mais comme il le dit lui-même : « rien n’est impossible ».
 
Avec l’aide de Vision Mondiale et après avoir obtenu une place durement gagnée à l’université, Sam a effectué un programme technique de trois ans en communication de masse dans lequel il n’avait pas besoin de savoir parler anglais. Il a ensuite décroché un emploi dans une station de radio catholique.
 
« Ce sont des dons innés que Dieu m’a offerts, parce que je ne pouvais même pas écrire une chronique. Mais j’étais très bon avec la technique et j’adorais le journalisme », confie-t-il.
 
Sam a travaillé comme pigiste pour des stations de télévision locales pour lesquelles il a produit des reportages, dont une couverture des violences qui ont suivi les élections de 2007. Puis, en octobre 2014, Sam a rejoint Vision Mondiale. « Quand j’ai posé ma candidature et que je suis me suis présenté pour l’entrevue, je savais que je n’avais pas le niveau de scolarité qu’ils attendaient, mais je leur ai juste dit : “Je suis un des vôtres et je suis excellent en [travaux] manuels.” »


A man operates a video camera
Sam couvrant une visite parlementaire canadienne au Kenya en mai 2018. Photo : Agnes Muvira Kiromera 

Aujourd’hui, Samuel Omoll travaille comme aide-vidéaste pour le département de la communication de Vision Mondiale Kenya. Il a épousé Treezah, avec laquelle il a deux beaux enfants : Lexy, 7 ans, et Hector, 4 ans.

Mais ce n’est pas tout! On ne peut terminer cette histoire sans évoquer l’organisme de charité qu’il a lui-même créé afin d’aider sa communauté, Mngaro Mtaani, qui signifie « de la lumière pour le quartier ».

Il a créé cet organisme pour que personne n’ait à subir ce qu’il avait vécu et parce qu’il voulait apporter de la joie aux autres.

« Je redonne aux autres parce que je sais ce que ça fait de manquer de quelque chose. Parfois, je n’avais ni vêtements ni chaussures. Parfois, je volais. Certaines filles se marient juste pour pouvoir avoir de quoi se vêtir », dit Sam. Il a commencé par rassembler des vêtements appartenant à sa famille et à les amener dans les bidonvilles, où il parlait également des dangers de la drogue et du crime aux jeunes. Aujourd’hui, cet organisme est enregistré et est venu en aide à 7 200 personnes.
 
Grâce à sa plateforme, Sam occupe maintenant ses soirées et ses fins de semaine à créer des liens avec des jeunes qui, comme lui, passent leurs journées au dépotoir et dans les rues de Nairobi qui l’abritèrent autrefois.

Par Agnes Muvira Kiromera

A woman and man embrace each other and pose for a picture
L’auteure avec Sam, au Kenya.